Quel désordre partout !
En garnison à Bourg-en-Bresse depuis le 1er août, Emile reçoit l'ordre, le 7 août, de rejoindre les troupes de son régiment, le 23e d'Infanterie sur le front. Le 9 août, il arrive avec quelques camarades à Dunkerque. Mauvaise destination : leur régiment se trouve en Champagne ! Ils en reprennent donc le chemin...
Vendredi, 6h. Soir.
Ma chère maman,
Me voici à Paris depuis midi : après renseignements pris à la Gare de l'Est - Commissariat militaire - nous reprendrons la direction de la Champagne demain matin à 8h40. Te dire que nous étions absolument vannés, est inutile !
Je suis descendu chez Tante Jane, et après avoir mangé un peu, je me suis couché et ai dormi comme un mort jusqu'à présent. Ca va beaucoup mieux, et demain matin toute fatigue aura disparu.
Je vais être obligé de demander cinquante francs à Jane. Dans ces grands déplacements, mon argent a filé, et, - si toutefois le 23e est en Champagne - il faut compter 3 ou 4 jours de voyage pendant lesquels on mange. J'ajoute que nous essaierons de nous faire indemniser par le régiment ! Mais ce sera dur ! Aussi, ai-je toujours recours à toi, pauvre maman, pour parer au mauvais sort : tu renverras ça à Tante Jane. Pourvu qu'en arrivant en Champagne, nous ne trouvions pas le 23e parti ailleurs ! Quel désordre partout ! C'est un signe des temps.
Adieu, mère chérie, je t'embrasse très fort. Émile.
Écouter la lettre du 10 août 1917