Dans 13 jours, l'examen, dans un mois, je serai au dépôt et peut-être en route pour Sauveterre.
Depuis le début du mois de mars 1917, Émile a rejoint l'École Spéciale militaire de Saint-Cyr où il suit une formation d'officier aspirant.
Saint-Cyr, le 18 juin 1917.
Chère maman,
J'ai reçu ta longue lettre qui m'apporte beaucoup de détails. Tout sera très bien, comme tu l'as préparé : chère maman, tu es une organisatrice. Il est regrettable que l'élément masculin manque un peu, votre sexe (le beau !) nous écrasera, et comme je serai fatigué et avide de repos !
Ces châleurs sont terribles, et nous fondons à vue d'œil. Aussi je reprends mes joues creuses. Dans 13 jours, l'examen, dans un mois, je serai au dépôt et peut-être en route pour Sauveterre.
Avez-vous eu vent là-bas des bruits qui courent au sujet de la lassitude, très grande lassitude de certains régiments du front ? Il paraîtrait que ma brigade en particulier (133e et 23e) ont refusé d'attaquer à nouveau. Et ce ne sont pas les seuls ! C'est un signe des temps : on est fatigué, fatigué jusqu'au dégoût et on demande à la vie ce qu'elle nous doit ! Et nos chers Parlementaires qui recommencent à jouer du tam-tam "Attendez, l'Amérique vient !" Oui, mais l'attente est trop longue pour tous et pour que l'Amérique puisse vraiment nous aider, il faut deux ans ! Alors ? Ne songeons pas à l'avenir, ne regardons pas plus loin que le bout de notre nez, et marchons !
A bientôt, chers aimés, j'ai grand besoin avant le nouveau départ de venir me retremper à la maison.
Baisers, Émile.
Écouter la lettre du 18 juin 1917