... la vie monotone qu'on mène ici fatigue.
Au terme de deux mois de cantonnement et de préparation militaire à Grenade-sur-Garonne Émile Moureu et les autres conscrits de la Classe 1916 affectés au 14e d'Infanterie de Ligne reçurent, le 30 novembre l'ordre attendu autant que redouté du départ pour le front. Après quelques jours à Toulouse puis de voyage en train, le régiment prenait garnison à Brimeux dans le Pas-de-Calais le 6 décembre 1915.
Sœurette,
J'ai reçu ta gentille lettre, pleine de regrets, malheureusement inutile : nous sommes toujours ici, jusqu'à quand ? Je ne sais, car ça barde là-bas, et notre offensive se déclenchera probablement bientôt.
Quand vous recevrez cette lettre, nous serons en mars, et mon opinion est que nous ne verrons pas ici le 1er avril, et nous ne demandons que ça, car la vie monotone qu'on mène ici fatigue.
Je suis très heureux que Pierre ait donné de ses nouvelles. Dans votre prochain colis, vous me mettrez deux caleçons en toile forte et assez large de l'entre-cuisses, parce que tous ceux que j'ai se déchirent, et aussi un peu d'eau de Cologne.
Après quelques jours de neige, le temps s'adoucit, on sent déjà le printemps venir, et il me tarde.
Je t'embrasse sœurette, ainsi que papa et maman, de tout cœur. E. Moureu.
Écouter la lettre du 29 février 1916