Notre vie, [...] est une suite d'aventures extraordinaires, ...
A l'issue de sa formation d'officier aspirant à l'École Spéciale militaire de Saint-Cyr et d'une permission d'une douzaine de jours à Sauveterre-de-Béarn à la fin du mois de juillet, Émile, désormais officier, a rejoint le 1er août son régiment, le 23e d'Infanterie, à Bourg-en-Bresse, sa ville de garnison. Il n'y reste que quelques jours, avant de partir, le 7 août, renforcer le détachement de son régiment engagé sur le front.
Dunkerque, le 9 août 1917
Chers aimés,
Notre vie, (c.à.d. La vie de mes cinq camarades et la mienne) est une suite d'aventures extraordinaires, comme le grand Ulysse lui-même n'en a jamais eu.
Je vais vous raconter mon voyage : Partis de Bourg lundi à 8 heures du matin avec un jour de vivres, nous filons sur Gray, gare régulatrice. A Gray, on nous dit que le régiment est parti dans les Flandres : nous arrivons ce matin à Dunkerque, et à Dunkerque on nous apprend qu'il y a eu erreur, que le 23 est toujours en Champagne. Et voilà ! Vous voyez que nous vivons dans l'extraordinaire et l'inédit jusqu'au cou. Et cependant, notre jour de vivres est depuis longtemps digéré, et la bourse s'aplatit singulièrement. Nous partirons ce soir probablement sur Paris, où nous tâcherons de passer un jour avant de rejoindre. Je vous tiendrai au courant de mes autres voyages, car ils ne m'ont pas l'air d'être finis.
Je vous embrasse, Émile.
Écouter la lettre du 09 août 1917