... mais ce qu'on sue : tout le peu de graisse qu'on a, fond.
Depuis le 10 avril, Emile Moureu est à Joinville-le-Pont, élève-aspirant à l'École d'Instruction Militaire des officiers. Ses lettres à sa soeur et à ses parents font le récit de son quotidien militaire et, lors des moments de loisir et de temps libre, de ses visites à Paris et ses environs.
Chère soeur,
De retour d'une longue marche de 24 heures sous une châleur accablante, j'ai trouvé ta lettre qui m'a réellement fait plaisir, tant par ses compliments si gentiment tournés, que par ces flots d'affection qu'elle m'apporte de là-bas. C'est une marche d'épreuve que nous avons faite, nous-mêmes avons fait une popote "excellente", mais ce qu'on sue : tout le peu de graisse qu'on a, fond. Je suis heureux que Pierre ait écrit, et qu'il soit bien maintenant. J'espère qu'à l'hiver prochain, tous deux serons revenus combler les places vides autour du grand foyer. Tous mes gros baisers à tous, papa, maman, Victor, Alexandre, Céleste. Dites à Alexandre qu'il est excellent d'être soldat, que quand on l'est, on le reste, ou on y reste, mais qu'à Sauveterre aussi, il fait bon, si bon ! D'ailleurs (toujours taquin !), il aura le temps de passer encore 2 ou 3 conseils avant la fin. Dites-lui que c'est pour la France, s'il s'enrhûme !
Emile.
Écouter la lettre du 10 juin 1915