Depuis mon départ, je n'ai pas reçu de lettre, et j'en suis un peu triste.
Depuis le 12 août, Emile a rejoint les troupes de son régiment, le 23e d'Infanterie, cantonnées sur le front de Champagne.
15 août, 18h.
Sœurette,
J'ai attendu impatiemment l'arrivée du vaguemestre, et encore rien pour moi. Depuis mon départ, je n'ai pas reçu de lettre, et j'en suis un peu triste. J'écris dans ma "cagna", assis sur deux sacs, un livre de Bourget à portée de main, ma blague de tabac ouverte pour ne pas avoir à l'ouvrir trop souvent. Sans le cadre qui m'entoure, je ne croirais pas au front : quelques éclatements très rares, et c'est tout ! Je me regarde, j'ai l'air d'un meunier qui se serait roulé dans sa farine : la terre est si blanche et si friable !
As-tu des nouvelles d'Henri ? Je lui ai écrit, ainsi qu'à Fly : encore rien ni de l'un, ni de l'autre. Cette nuit, je crois que nous pourrons dormir tranquille.
Adieu, sœurette, je t'embrasse de tout cœur avec papa et maman.
Émile.
Écouter la lettre du 15 août 1917