Et j'ai bien peur que le repos espéré ne soit qu'un mythe : ...
Depuis le 10 octobre, Émile et son régiment sont sur le front de Verdun et ses tranchées boueuses, alternant périodes en première ligne et en réserve.
Chers aimés,
Je suis gâté, autant que soldat peut l'être : une lettre presque tous les jours, tantôt de maman, tantôt de sœurette, et toutes m'apportent tant d'affection, tant de tendresse que j'en suis tout réchauffé. Encore dans mon trou pour un jour ou deux ! Et j'ai bien peur que le repos espéré ne soit qu'un mythe : contre-coup des affaires italiennes, et du déplacement de quelques-unes de nos divisions, nous descendrons cependant en réserve pour quelques jours.
J'ai aussi reçu les colis, la nuit dernière, vers 2 heures du matin, et j'ai déjà goûté avec délices ce délicieux "boum", ce beurre frais et ce fromage piquant, toutes ces bonnes choses qui rappellent la bonne vie de là-bas dans ce pays de mort et de pourriture. André Cazenave et Berthe Salies feront un beau couple, ma foi ! Là encore, cherchez l'influence de la sœur, pas ?
Adieu, chers aimés, je vous serre sur mon cœur.
Je n'ose encore parler de ma permission que j'escompte dans un mois. Embrassez Pierre et Henri.
Émile.
Écouter la lettre du 5 novembre 1917