Comme vous le voyez par les journaux, l'attaque de Verdun est terrible ...
Au terme de deux mois de cantonnement et de préparation militaire à Grenade-sur-Garonne Émile Moureu et les autres conscrits de la Classe 1916 affectés au 14e d'Infanterie de Ligne reçurent, le 30 novembre l'ordre attendu autant que redouté du départ pour le front. Après quelques jours à Toulouse puis de voyage en train, le régiment prenait garnison à Brimeux dans le Pas-de-Calais le 6 décembre 1915.
Vendredi, 3.
Bien chère maman,
Hier matin, j'ai reçu ta lettre si affectueuse, si pleine de douce tendresse et hier soir le précieux colis annoncé est arrivé avec ses milles bonnes choses de là-bas, et chacune de ces choses représente pour moi un monde de jouissances.
J'ai lu et relu la lettre de mon grand frère où il se montre tout entier avec sa longue patience parfois lassée, ses pensées constantes au sujet de nous tous, pensées qui soutiennent et gardent l'espérance. Comme vous le voyez par les journaux, l'attaque de Verdun est terrible, pas prête de finir, et si les Boches ont à enregistrer de leur côté plus de 100000 hommes de perte, nous avons nous aussi à en déplorer presque autant.
Et cette année-ci, à mon avis, sera une série de ces attaques acharnées et à grande envergure, jusqu'à ce que tout cesse, c.à.d. vers la fin de l'année.
Adieu chère maman, cher papa, sœurette.
Je vous embrasse tous sur mon coeur, Emile.
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Écouter la lettre du 03 mars 1916