... j'irai probablement chez ma Tante, où m'attend un bon gigot : je suis gâté, vous voyez.
Après avoir été blessé à la tête par un éclat d'obus en 12 septembre 1916 dans la Somme, et une convalescence à Chartres en octobre, Emile réintègre le 133e R.I. à la caserne de Belley dans l'Ain, ville proche du lac du Bourget et d'Aix-les-Bains en novembre 1916 et jusqu'en janvier 1917. De cette période et de la suivante (janvier - février 1917) qui le voit à nouveau en campagne sur le front, une seule lettre est conservée, datée du 11 janvier. L'absence de correspondance dure jusqu'au 17 mars 1917 ; il écrit de l'Ecole Spéciale militaire de Saint-Cyr où il se trouve depuis le début du mois.
Saint-Cyr, le 17 mars 1917.
Chers aimés,
J'ai reçu la bonne lettre de maman avec le mandat demandé, et avec aussi beaucoup de bonnes nouvelles. Anna passe quelques jours agréables à Pau : tant mieux ! Elle mérite bien son bonheur. J'ai reçu une carte d'Henri ainsi conçue : "En route vers le front ! A bientôt de plus amples nouvelles !" Pierre a écrit et nous savons qu'il sait quelque chose de nous : il nous semble ainsi qu'il vit plus près de nous, quoique encore trop loin. Maintenant, abordons la question du mandat de 30 f : depuis que suis à St Cyr, la première lettre, adressée directement, datée du 8 mars, et maman me demande déjà là si j'ai reçu le mandat. Donc la lettre a dû s'égarer : faites une réclamation immédiate, et dans deux ou 3 mois, les trente francs seront remboursés, après enquête faite.
Nous avons aujourd'hui un temps magnifique, et aussi l'heureuse perspective, après une semaine bien remplie, de passer une bonne journée à Paris : j'irai probablement chez ma Tante, où m'attend un bon gigot : je suis gâté, vous voyez.
Adieu, chers aimés, je vous embrasse de tout cœur,
Émile.
Écouter la lettre du 17 mars 1917