Merci pour ta photographie, chère maman, ne t'accuse pas de coquetterie, car ton image est encore bien plus belle dans mon coeur !
Depuis le 20 septembre, le sergent Émile Moureu est cantonné à Grenade-sur-Garonne, avec l'ensemble des conscrits de la Classe 1916 affectés au 14e d'Infanterie de Ligne. Il y découvre la vie en garnison rythmée par les exercices militaires et de combat, dans l'attente impatiente autant qu'inquiète de l'annonce d'un prochain départ pour le front.
Ma chère maman, Je viens de recevoir ta lettre si affectueuse. Je l'ai lue, relue, ainsi que la lettre si intéressante de mon frère. Merci pour ta photographie, chère maman, ne t'accuse pas de coquetterie, car ton image est encore bien plus belle dans mon coeur !
Je joins à ma lettre quelques mots pour mon frère, je souhaite qu'ils lui parviennent dans son lointain et qu'ils lui apportent un peu de cette patience qui leur est si nécessaire.
Nous, nous sommes toujours là, dans l'attente. Il part beaucoup de troupes en Serbie, mais jusqu'à présent, du moins à Toulouse, ce sont des hommes qui reviennent du front. Ici, on ne sait rien, on attend, prêts à partir à toute heure, et vivant sa petite vie tranquille de petite ville avec quelques calmes manilles et quelques frémissants écartés.
Adieu, chère maman, cher papa, soeurette, écrivez-moi souvent, très souvent.
Je vous embrasse comme je vous aime.
Émile.
Écouter la lettre du 15 octobre 1915